Ha mais que vois-je ? Le calme revenir, dame ! La toute grande tranquillité cordiale ! (Tu vas bien ? — Oui, super bien ! et toi ?) Les logis et les blogs en sont aux nettoyages de printemps, on vide les dernières poubelles, on récure dans les coins, on tue les cancrelats, on envoie le chlore à grands seaux ! Qu’est-ce que ça fait du bien cette blancheur retrouvée ! Cette pureté pleine de gazouillis d’aise ! Vive le soleil et la sécurité ! Vive les embrassades sur le gazon tendre de la félicité ! Et de la riante justice ! Vive la France clean !
C’est que ça a été dur cet hiver.
Ces combats, ces luttes, ces guet-apens, ces mitraillettes dans la nuit, ces flaques de sang, ces bottes noires qui glissaient sur les intestins fumants. On a voulu comprendre, connaître la vérité, tirer les bons fils, trier le bon groin de l’ivresse des cochons. Trouver les fils d’or. On a voulu démonter les systèmes, ausculter les images, traquer les impostures, débusquer l’infamie, voir ce qu’ils cachaient ces traquenards, disséquer les expériences, mettre à plat les évidences, soumettre les papes à la question, leur faire cracher le foie sur le gris des rivages… Mais rien n’est aussi visqueux qu’un pape de guerre, qu’un seigneur bifide, aussi vicieux ; à côté Machiavel est un sac de guimauves. La citadelle est imprenable mes amis. La citadelle a toujours raison, en haut de la dune. Toujours raison.
Quelqu’un disait : Ils sont très forts, ils ont des moyens inimaginables, colossaux. Et c’est vrai. Outre qu’ils savent s’entourer, ha les finauds, de tristes vassaux qui leur mangent dans la main, leur ventilent les petons. On avance ouaté maintenant dans ces acropoles. On exige les cartes voyez-vous, on filtre les accès, on interdit les hoquets, toutes les dissonances. Que des chansons douces et mesurées. Des tartines de miel et des geishas. Les invités sont priés d’ôter leurs chaussures, de marquer courbette et d’afficher un sourire permanent : car tout va bien. Tout va bien ! tout va bien ! tout va bien ! harangue le pontife, rubicond : nous avons été infiltrés par l’ennemi un temps, mais là c’est bon mes tout chéris, il est mort l’ennemi ! Irradié ! Et il ne reviendra (donc) plus ! Toutes les entrées sont férocement gardées, je vous le dis : l’ennemi est a-né-an-ti ! Vive le roi ! Vive Moi ! Dansons !
« Mais il faut laisser des traces dans le néant ; donner consistance au vide, le cerner, le décrire, lui donner matière à ce vide, l’enrichir, ne pas en avoir peur car il n’y a que lui comme nouvelle matière. Le vide – notre vide – est la matrice des temps futurs. La nouvelle Origine. L’Autre Monde ne pourra tomber que sous le feu nourri des Armées du Vide.
Notre seule chance. » HYROK, p. 218
En attendant, moi, le sinistre, le vilain nauteur, le tripanosome aux yeux ouverts, j’aiguise ma lame à la meule triple zéro, elle tourne toute la nuit. Tssssssszzzzzzsschhh ! Autant vous dire que ça va couper net.
A part ça, les Philippines, d’où je vous écris sous un parasol, c’est vraiment un pays formidable. J’avais besoin de prendre un peu de distance avec le monde alors hop ! un petit bond ! Douze mille kilomètres ! A moi l’archipel aux sept mille îles ! Les felouques en bois creusé ! Et de ces petits plats à l’huile de palme, terrible ! Mouette rieuse farcie, singe au kari-kari, Tinolang de tigre au binakul, fruits poilus et polychromes ! First class, comme bouffe ! Rien à voir avec les asiates de chez nous.
Demain je prends l’avion pour aller rejoindre mon éditeur à Kyoto, un peu plus haut. On va se faire, hilares, un fugu au Nishiyama Hotel******. Un bon gros fugu en sashimi (ou en nabe). Vous connaissez le fugu ?
Étiquettes : Nettoyages de printemps
1 avril 2010 à 09:02 |
Hello NLR !
C’est vrai de vrai, vous êtes vraiment là-bas ? ;)
J’aime beaucoup votre texte, surtout le « ces bottes noires qui glissaient sur les intestins fumants » Excellent !
Ca à l’air d’aller Nicolaï… je vous sent prêt à rebondir, à tourner une page, non pas à oublier, mais à souvenir, une image, qui vous rappellera ce qui a lieu d’être, et vous permettra d’avancer plus solide encore, plus aiguisé, comme si c’était vous l’outil sur cette meule.
Excellent journée, cher Nicolaï ^^
1 avril 2010 à 10:02 |
J’attendais..au moins un..hareng saur…mais rien…trés beau texte. Tu as moins de doutes que Kolbleu…
1 avril 2010 à 12:13 |
Un beau moment d’évasion que de te lire, et pas seulement grâce aux Philippines…mais aussi à toutes ces images, drôles et féroces, que tu convoques pour dire l’âpreté de la lutte, la beauté du combat. Pour répondre à Grenouille, on pourrait dire que pendant que tu aiguises ton couteau, moi je cherche le mien, tout en désespérant de n’avoir que moi comme meilleur ennemi…
1 avril 2010 à 17:08 |
Je sens une ironie à la fois tendre et dévastatrice, pour ma part. Bref, un second degré assez redoutable… Nicolaï, je me demande si tu n’es pas une sorte de dangereux fugu du ouèbe, hahahahahahaha !
1 avril 2010 à 19:48 |
@Panthère. Tanx ! Je vous enverrai une tarte poscale. C’est ma nouvelle manille.
@Grenouille. Je doute que j’en aie moins, justement.
@kolbleu. Parfois je me dis qu’il ne faut pas trop aiguiser. Sous peine de se trouver qu’avec le manche.
@Sophie. Je me demande aussi. Et comme je n’aime pas trop douter, je vais revenir bientôt au premier degré. Ça sera dur mais nécessaire. Rien de tel, je crois, qu’un bon premier degré à canon scié.
2 avril 2010 à 06:40 |
Le mieux, cher Nicolaï, le couteau sans lame auquel il manque le manche, quel temps à Kyoto, ce cher pays de mon enfance?
2 avril 2010 à 10:22 |
Il pleut et le fugu était un peu amer. Mais on va pas se plaindre : les écrevisses sont en fleurs, les hototosigu sortent de leur trou, et c’est un plaisir nouveau de se balader dans ces massifs de shirabe où ça sent si bon le shii. Sans oublier les todomatsu évidemment. Par contre, hier un tanuki m’a sotetsu, ça c’était moins drôle.
Je vais sans doute ramener un sabre.
3 avril 2010 à 08:48 |
Ce Fugu est bien un poisson japonais? Tu sais comment on appelle un perroquet hilare?
Et cette autre aphorisme de Lichtenberg, le connais-tu?
CRITIQUE LITTÉRAIRE
Je tiens les comptes rendus critiques pour une espèce de maladie infantile qui s’attaque plus ou moins aux livres nouveaux nés. Il y a des exemples prouvant que les plus robustes en meurent, tandis que souvent des livres débiles résistent. Certains sont même tout à fait immunisés.
(Aphorismes. Paris, Jean-Jacques Pauvert, 1966, p. 60)
3 avril 2010 à 08:51 |
Source http://www.biblioconcept.com/citations/citations_de_lichtenberg.htm
3 avril 2010 à 21:26 |
Un ara qui rit.
4 avril 2010 à 01:02 |
La vache, Super Nic’, ton quotidien hivernal a été trash à c’qu’on dirait ! Des papes sans foie, des lois sans nids, des incendies, de la tripaille et des andouilles (mais séparées, ça prête moins au p’tit blanc qui chante.) Faut pas te mettre dans ces états-là, KamaraD ! Je vois pas trop ce que ça pourrait être, à part le sentiment que tu l’as payé Scheer, ton bon Hyrok !
Bon, je suis content de voir que tu es parti avec Denis faire un bon Koh-Lanta aux Philippines pour retrouver en toi la bonne et saine agressivité, apprendre à niquer ton prochain mais au rythme de na nature.
Quand tu seras revenu, n’oublie pas qu’il y a des gens qui attendent le tome 2 parce qu’ils ont aimé le 1, et que ça, personne ne pourra te l’enlever, broz’. Ok? Capisce? Comprende? Klar?
Allez, arrête de fuguter, décapsule une mousse et retourne écrire !
7 avril 2010 à 18:26 |
@r1. Là je me bats avec des camemberts. Pour le tome 2 (au cumin), faudra être un peu patient. Mais tu es un homme patient, je le sais.
@Sophia-Maïté Ray. Mes fromages, Madame.
14 avril 2010 à 11:00 |
en fugu en nabe, c’est quoi? un concept? *_*
14 avril 2010 à 11:28 |
@Cécile D. Culinaire, oui. Si vous avez Google, n’hésitez pas à y faire un tour (vous tapez « fugu » et « nabe » dans la petite fenêtre allongée et vous cliquez sur « recherche Google », vous verrez c’est magique) **–**
14 avril 2010 à 16:46 |
oh! mais Nicolai je l’avais déjà fait avant de poster! C’était juste un joke… en référence à… *_*