De la démocratisation

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ÈRE ANALOGIQUE (jusqu’en 1990 environ)

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ÈRE NUMÉRIQUE (depuis 1990…)

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Jean-Daniel ralluma un vieux bout de Havane, s’enfonça dans son fauteuil et se détendit. Avec cette démocratisation, songea-t-il un peu triste, un premier prix de Conservatoire, un excellent photographe, un écrivain hors-pair, peuvent à peine survivre dans leur art. Alors qu’autrefois, avant la révolution numérique, une fille quelconque qui chantonnait, un photographe muni d’un « reflex », un plumitif besogneux, pouvaient prétendre à une carrière tout à fait acceptable ; ils pouvaient sans problème remplir le frigo, avoir des gosses, avoir une vie normale.

En vérité, le « star system » à étoiles uniques s’effondrait, érodé sur tous ses flancs par le sel de l’ère numérique et de la « mondialisation ». Outre les stars vieillissantes à l’éclat un peu terni, ne résistaient que ceux qui avant tout bénéficiaient d’un solide réseau et d’importants moyens financiers. Sans compter qu’il fallait beaucoup d’énergie pour durer au-dessus des flots — position dominante et toujours convoitée. Durer n’était pas donné à tout le monde ; la concurrence était plus rude que jamais, il y avait en grand nombre des gens de talent « venus de nulle part » (notamment des « tréfonds du web ») et il fallait défendre sa place avec férocité.
Malgré tout, cette situation sans précédent comportait quelques aspects plaisants. Par exemple Francis, le meilleur ami de Jean-Daniel, avait pu équiper son fils d’un matériel informatique très performant qui lui permettait de créer, seul et avec une relative facilité, des courts-métrages amusants, des musiques de films, de jolies photographies retouchées, tout un tas de choses passionnantes ; ils avaient même conçu en famille les plans du nouveau salon avec la partie bar et la véranda. C’était très pratique ; nul besoin de faire appel à un décorateur professionnel ou un architecte d’intérieur (en tout cas pour la phase idées/conception) ; ainsi pouvait-on faire de substantielles économies, toujours bienvenues.
D’autre part, chacun pouvait désormais, avec un peu de persévérance et une bonne poignée d’amis, devenir une starlette régionale dans le domaine qui la faisait rêver, le temps d’une saison ou deux. Il fallait tâcher de créer sa « niche » et s’y accrocher bec et ongles.
Ainsi le star system d’antan se vit émietté en une constellation de niches artistiques plus ou moins scintillantes qui recouvraient la surface du monde occidental – monde physique, ou monde virtuel (où les régions correspondaient à un nouvel espace topologique sans dimensions autres que celles déterminées par les « contacts » et leur adresse mail).
Les artistes et les « stars » – enfin ce qu’il restait de cette notion désuette – étaient partout. Avec à leur ceinture leur petite notoriété éphémère qu’ils chérissaient jalousement et défendaient sur les « réseaux sociaux », attendant,  on peut dire naïvement, la « consécration internationale ».

Pendant ce temps, Pascal Pécheux, boulanger à Cormeil, confectionnait croissants, miches savantes et tartes aux fruits. Loin du numérique.

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40 Réponses to “De la démocratisation”

  1. Yola Says:

    Tout le monde peut donc avoir son quart d’heure de célébrité. Mais sans les artistes et les stars, notre imaginaire en prend un coup.

  2. Cécile Delalandre Says:

    Tellement vrai tout ça! et comme d’hab superbement plaisant à lire…
    mais je crois que là on est dans une ère qui traverse un sas de remous et tourbillons anarchiques, insensés et en apesanteur dans un vide sidéral balancé comme un gros vent incarné et gonflé à l’hélium de l’ego.si aisément caressable !..
    Il va falloir du temps pour qu’il se dégonfle et trouve une sortie acceptable
    on aura vécu de plein fouet la mutation… connaîtra-t-on le golem qui en naitra?

  3. brochettedecheval Says:

    j’ai pas tout lu mais j’aime bien l’écriture même si (bon ben je vais tout lire en fait, a de suite……….)
    Ben c’est un peu fataliste en fait

  4. RitonLaZone Says:

    Je ne suis pas bien sûr de la pertinence des propos, le numérique a bon dos, surtout dans le cas bien particulier qu’est la photographie.
    Changez de lunettes, cette période est vraiment la meilleure que l’on puisse trouver, c’est la notre, et nous n’aurons pas droit à un deuxième tour !!!

    A+

    RLZ

  5. Sophie K. Says:

    Comme le dit Cécile, on essuie les plâtres… Pas sûre que les choses ne changent pas à plus long terme. Pour tout te dire, j’en connais des gars qui ont refait leurs appart’s sur des logiciels pour ne pas dépenser trop. Le résultat a été pour l’ensemble catastrophique, tellement même que pour réparer les dégâts, ils ont dû payer deux fois plus. Même avec une machine formidable, on ne s’improvise pas architecte ou cinéaste. Il reste la base bêtasse à apprendre : un mur porteur ne s’abat pas si vous ne voulez pas recevoir le plafond sur la tronche, etc.
    Le numérique est un outil, tout comme l’était l’appareil photo en son temps. Il change la méthode de travail, le talent, l’étude et le travail n’en demeurent pas moins nécessaires. Enfin il me semble…
    :)

  6. Sophie K. Says:

    En revanche, je crois vraiment que la cooptation des élites est à l’origine des soucis des artistes (entre autres), et que le gel des salaires à la fin des seventizes n’a rien arrangé. Le Monde Marchand, décrit par Debord, règne partout sur tout, et lui, il ne veut voir qu’une seule tête : celle qu’il choisit et qui rapporte ! Grâce à lui, le prix du pain a été libéré, ce qui fait que ton petit boulanger gagne désormais mieux sa vie qu’un plumitif, un photographe ou un peintre.
    Ah là là.

  7. Nicolaï Lo Russo Says:

    Merci pour vos commentaires. Petite précision, qui peut-être n’apparaît pas assez clairement dans ce que j’appelle – enfin, je ne suis pas le seul à l’appeler comme ça hein – la « démocratisation numérique ». Je ne fustige pas le nombre croissant de logiciels qui permettent à chacun de se lancer qui dans le cinéma à moindre frais (encore que), qui dans la photo, qui dans la musique chez soi (le fameux « home studio »), etc. Je dis que le principe de rareté, lui-même pourvoyeur de valeur, a disparu depuis l’apparition du tsunami numérique. En faisant apparaître des talents véritables (qui ne pouvaient s’exprimer avant cette ère-là, où tout était inaccessible), le numérique a drastiquement augmenté l’offre, et ce sans que la demande n’augmente en proportion, faisant ainsi baisser les prix, parfois même jusqu’à la gratuité, très commune sur le web. (Combien de photographies achetables en agences de stock on vu en quinze ans leur prix divisé par cent ?, hein RLZ…). Plutôt que d’être payé pour son travail (comme ce fut longtemps le cas), le créateur se voit à la place gratifié de ce qu’on appelle « l’e-réputation » (avec les « like » ou des « dislike », cette sorte de nouvelle monnnaie…), espérant que celle-ci se transforme rapidement en monnaie sonnante et trébuchante – ce qui est rarement le cas (à moins d’un buzz planétaire). Ainsi pour pouvoir s’en sortir, un artiste de quelque « art » qu’il soit, doit faire preuve de plus de talent, d’énergie et d’astuce qu’avant, car il y a, plus que jamais, du « monde au portillon ». Et c’est là que les « élites » dont parle Sophie tirent un avantage évident de la situation ; élites qui ont suffisamment de réseaux, de systèmes de cooptations pour que cette « conversion » monétaire se fasse (parfois même indépendamment du talent…). Pour les autres c’est très dur. Mais l’important c’est de participer, n’est-ce pas ? :-) (gonflant de ce fait l’égo cyclopéen de ceux qui peuvent ENFIN s’exprimer, comme le rappelle Cécile…)

  8. RitonLaZone Says:

    Bonjour,
    Je reste globalement pas d’accord avec les analyses.
    Je ne situe pas trop les problèmes au niveau du numérique,
    Mais plutôt de la profusion, cette profusion a été générée par une baisse des coûts, une ENORME baisse des coûts, mais cela touché tous les domaines, et nous en avons très largement profité en terme de niveau de vie.
    Ensuite pour être juste et honnête, il faudrait troquer un valeur de temps, une heure de photographe contre une heure de paysan, de vigneron ou de cuisinier. Mais notre niveau de vie en prendrait un sacré coup ;-))

    Pour la photo, personne n’est obligé de brader ses images, je n’ai pas changé mes prix depuis 10 ans, mes coûts de production on beaucoup baissé, mais je vends moins de reportage.
    Pour tenter de régler ce problème je fais toujours la même chose, faire ce que ne font pas ou ne peuvent pas faire les autres.

    Pour l’histoire des pro et des amateurs et des outils modernes qui permettent de tout faire, en premier lieu c’est faux, en deuxième lieu c’est ridicule de le dire au sujet de la photographie, celle-ci étant une invention d’amateur, totalement porté par des amateurs.

    Je n’ai pas peur des amateurs, ma maison date des années 1560 et a tété construite et pensée par des amateurs et tient toujours debout et nous y vivons très bien. Et pour un certain nombre de travaux d’entretien et d’aménagement, je prends ma casquette d’amateur et je fais les peinture, la plomberie etc etc.
    Je ne vais pas râler si d’autres le font dans d’autre domaine y compris la photographie.

    RLZ

    Faites ce que ne font pas les autres !!!

  9. Sophie K. Says:

    Ah c’est complexe, oui. On est en plein dans phénomène quantité vs qualité. Je crois quand même que les choses seraient plus simples pour tous si les gars d’en haut étaient un peu moins carnassiers et jaloux quant au pognon et aux réseaux.
    On peut voir les choses autrement : le web est un moyen de sortir de la cooptation, justement. Je dis pas que ça permet de gagner des milles et des cents, c’est sûr, mais cela fait sortir des artistes de cette putain de loterie pipée (depuis longtemps) hors des circuits commerciaux bien bouclés.
    Je suis plutôt d’acc’ avec Riton : faut faire ce que les autres ne font pas. On a encore des chances par là, parce que comme toujours, le « faiseur » qui se croit original, est en fait trop soumis aux modes, au contraire de ce qu’il pense… ;-)
    En même temps, l’art a de tous temps été un métier de crève-la-faim, c’est pas nouveau (ce qui est nouveau, depuis Picasso, c’est plutôt l’artiste millionnaire, haha !)

  10. leboldu Says:

    Il y a eu une période où les artistes n’étaient pas du tout rémunérés pour ce qu’ils faisaient (les troubadours, par exemple). Donc, d’une certaine manière, on est peut-être entré dans une sorte de Moyen-Âge pour les arts, du fait de la surenchère d’offres due à la démocratisation et au numérique – Moyen-Âge qui, comme on le sait, est une période qui peut durer… (Mais comme le laisse entendre Sophie K, et comme partout, le poison recèle peut-être en lui–même son antidote, puisque Internet et les réseaux sociaux permettent aussi à tout un chacun de s’exprimer, donc de faire entendre « une autre voix », et donc de se promouvoir par soi-même, même si c’est à toute petite échelle.)

    • RitonLaZone Says:

      <<Il y a eu une période où les artistes n’étaient pas du tout rémunérés pour ce qu’ils faisaient (les troubadours, par exemple).<<

      Difficile de dire plus de conneries, le Moyen-Age n'avait aucun problème avec les artistes, ils gagnaient leur vie, plutôt bien, voir très bien.

      A la renaissance, comme l'artiste "moderne" fait son apparition, la situation devient plus contrastée, et au XIXème apparait l'artiste maudit, le crève la faim, mais tout cela est très moderne.

      RLZ

      • leboldu Says:

        Je n’ai pas dit qu’ils n’étaient pas nourris, logés et parfois même rémunérés, mais pas pour leur art à proprement parler (c’est surtout pour la fonction divertissante qu’ils opéraient au sein des cours qu’ils traversaient qu’ils étaient reconnus : la notion d’art a depuis comme vous le dites beaucoup changé : elle s’est en quelque sorte déshumanisée). Sinon, vous avez vécu au moyen-âge ?

      • RitonLaZone Says:

        <<Sinon, vous avez vécu au moyen-âge ?

        Non, mais pas pour ce type de raison.
        A – je n'ai pas le choix
        B – j'adore notre époque
        C – je suis trop paresseux pour aimer les temps anciens.

        Ils n'était pas parfois rémunérés, ils étaient rémunérés et beaucoup mieux que le paysan du coin. Ils étaient des artisans et non des artistes, statut qui réapparait à la Renaissance.

        RLZ

  11. leboldu Says:

    (Il y avait probablement très peu d’élus dans cette classe d’artistes-artisans…)
    Cela dit, je reconnais que mon exemple est mal choisi : je pensais surtout aux premiers poètes (et puis à ceux d’ensuite, ceux que l’on dits maudits) qui ne pouvaient pas (sans un mécène) être rémunérés pour ce qu’ils faisaient. Je crois que les tout premiers artistes (s’il y en eut, et dont on ne sait rien) ont dû à mon avis faire preuve de beaucoup plus de gratuité et de désintéressement dans leur art au tout début que ce que nous sommes à l’heure actuelle en mesure de produire dans notre système moderne (où tout le monde veut tout, tout de suite). C’est dans ce sens que je parlais de retour au Moyen-âge : pour être reconnus de nos jours, les (véritables) artistes vont devoir beaucoup donner, sans être forcément rémunérés de prime abord.

    • RitonLaZone Says:

      On ne peut pas bâtir des théories sur des bases historiques complètement fausses.
      Il y a des artistes (presque dans le même sens qu’aujourd’hui) dans le monde antique, puis au Moyen-Age nous avons des artisan très haut de gamme et très reconnus.
      Puis à la renaissance, il y a un retour de l’artiste, avec des ségrégations lié à la pratique de cour, et enfin au XIXème des artistes maudits, qui sont des créateurs vivant d’expédiant.
      La période noire c’est le XIXème et rien d’autre.

      Notre système moderne est très favorable à l’artiste, encore faut-il que celui-ci accepte le cahier des charges, qui est plus social qu’artistique.

      RLZ

  12. Sopie K. Says:

    Riton : Vous avez raison pour le XIXe, période particulièrement compliquée (voir Balzac qui s’est tué au travail, et tant d’autres). Ceci dit, le mécénat des grands ne permettait tout de même pas à tout le monde de vivre sur un grand pied. Molière ne fut pas si riche, Pic de la Mirandole dut constamment chercher la protection de Laurent de Medicis, et plus tard, Rousseau ou Casanova, pour ne citer qu’eux, connurent une vie plus qu’instable. Quand on dépend d’un pouvoir, il faut être courageux pour continuer à exprimer des pensées que celui-ci ne tolère pas.
    Ce fut peut-être un peu moins le cas pour les peintres, selon les époques. M’enfin ça n’a jamais été tout rose.

  13. RitonLaZone Says:

    Tes exemples sont juste, mais ne parlent pas du Moyen-Age.
    La Renaissance c’est le début d’une évolution.

  14. Sopie K. Says:

    En fait, le XIXe marque la passation de pouvoir entre le mécénat religieux et noble à celui du monde industriel. Entre les deux, il a fallu réinventer un système de financement de l’art. Peut-être sommes-nous en train de quitter le financement des élites pour celui, direct, du peuple, à l’heure actuelle. Internet pourrait le permettre…

  15. Sopie K. Says:

    RZ : oui, on se tutoie, pardon, héhé. Je suis d’accord sur le fait que le Moyen-âge considérait les artistes comme des artisans. A tel point même qu’ils ne signaient leurs oeuvres que très rarement.

  16. Sophie K. Says:

    Tiens, j’avais perdu mon h dans l’histoire. Groumpf.

  17. RitonLaZone Says:

    La signature est rare au MA, mais ce qui compte c’est de bosser et de se nourrir ;-)))
    Aujourd’hui la situation est assez intéressante, j’aime bien notre époque.
    Financer l’art, je m’en contrefouts ;-)) financer les artistes, cela commence à m’intéresser …

    RLZ

  18. Sophie K. Says:

    Ah ben oui. Quand je dis l’art, c’est par flemme. j’aurais dû dire les artistes, of course. (Enfin, nous, quoi.) :-D

    Bon. je ne fiche rien depuis ce matin, ce qui ne va pas me financer des masses. Je vais donc de ce pas me morigéner et m’amender.
    Hop.
    @ +

    • RitonLaZone Says:

      Ok, morigène, morigène, il en restera toujours quelque chose ;-))

      Laissons le travail aux artisans, nous autres artistes, nous créons, c’est autre chose ….

      RLZ

  19. leboldu Says:

    « Notre système moderne est très favorable à l’artiste, encore faut-il que celui-ci accepte le cahier des charges, qui est plus social qu’artistique. »
    là pour moi c’est vous/toi qui dis n’importe quoi, je suis désolé (ou alors tu sous-entends que tout ce qui a les atours/prend la posture de l’art est artistique, ce que je ne crois pas)
    Par ailleurs un artiste qui aime son époque, ça me laisse pensif…
    (je crois qu’on ne doit pas avoir la même définition du mot artiste, voilà tout)

    • RitonLaZone Says:

      Oui un artiste peut aimer son époque, un artiste peut aimer la vie, les artistes maudit c’est le XIXème siècle et nous sommes au XXIème.
      Il ne faut pas mélanger Art et artiste, artiste c’est un statut social aujourd’hui, certains font de la création, d’autres n’en font pas, il n’y a aucune obligation d’en faire, être peut sufir, on peut même transformer sa propre vie en œuvre ….

      RLZ

  20. leboldu Says:

    Je comprends mieux ton point de vue (même si je n’y adhère pas). Pour élaborer des théories, il ne faut pas partir sur des bases historiques fausses. Mais pour faire de l’art (ou être un artiste), on peut ne pas tenir compte de toute l’histoire de l’art jusqu’à présent, faire comme si de rien n’était, et jouer les artistes (avec en prime le petit statut social qui le fait bien) comme tous ces « écrivants » et autres sculpteurs de l’impossible qui phagocytent la scène depuis la démocratisation de l’art et l’ère de la reproductibilité technique (annoncée par W. Benjamin). Vive le progressisme…

  21. Nicolaï Lo Russo Says:

    Hé bien… :)

    @leboldu. Bonjour, et bienvenue. « Se promouvoir par soi-même, à petite échelle ». Oui, c’est ça : bâtir sa niche au mieux de ses possibilités. Faire un truc et avoir quelques « followers », comme un blog… (De là à ce que ça remplisse le frigo, c’est une tout autre histoire). Et ok avec vous sur le reste, notamment la déshumanisation de l’art au profit, bien évidemment de sa rentabilité, du marché, etc. (Ne vous en faites pas, RLZ est un gentil garçon, un peu sec et péremptoire parfois, mais gentil – et moins paresseux qu’il le prétend :)

    Moi aussi, je pense qu’un artiste « qui aime son époque » ne peut être qu’un décorateur, ou un suiveur. Je préfère de loin les artistes qui sont contre que avec leur époque. Les oeuvres les plus fortes sont nées de refus, de contre-courants, de luttes contraires, voire de proximité avec la fin, avec la mort.

    @RLZ « Le cahier des charges est plus social qu’artistique ». C’est en effet la tendance, et c’est bien ça le problème : on quitte l’essentiel. Peu importe que tu sois bon ou pas, l’important, l’ascenseur, c’est qui tu fréquentes, ton réseau, ton signe astrologique, etc ; le reste étant tout à fait secondaire.
    Et puis artiste c’est un mot qui tombe en désuétude. On n’aime pas trop les « artistes ». Voir ici.

    @Sophie. « Nous (les artistes), on pense à des trucs plus grands que l’Homme, même pendant la sieste. »
    J’achète ! :)

    Bon à part ça, phénomène qui illustre parfaitement mes propos ; je viens de m’intéresser ces temps-ci à la « web-rédaction » (histoire de mettre un peu de margarine dans les épinards) : Suivant le principe fréquent sur le web de la « place de marché », il y a des start-up qui organisent la « mise en relation » de rédacteurs avec des sites qui ont besoin de « contenu rédactionnel » pour leur pages (genre voyage, beauté, jardinage, assurances, recettes cuisine, etc.) Les articles à écrire ont en moyenne 300 à 500 mots (ce qui correspond, pour 500, à une page A4 environ). A priori ce n’est pas une mauvaise idée. Pour le rédacteur il suffit d’avoir une bonne syntaxe et une orthographe correcte (avec tests à la clé – que j’ai passés avec la mention « très bon » ; la flatterie est, je crois, une sorte de carotte de bienvenue, bref… ;) Or quand on se penche sur les tarifs moyens pratiqués côté auteur, on a des choses comme : 0,004 ct d’euro/mot (!) ; ce qui pour un article de 500 mots fait 2 euros de gain (payable par Paypal dès 50 euros atteints). Pour ma part, écrire un texte de ce type et de cette longueur me prend environ 30 minutes (je m’y suis essayé). Sans compter le temps de recherches d’infos sur le web pour étayer l’article – qui, nous somme-t-on, ne doit pas être du « copier-collé » (en fait il veulent des textes « inédits » et frais…) Payés 4 euros de l’heure ! Des négriers ! Eh bien vous me croirez ou non, des centaines d’auteurs en mal de quelque argent de poche (étudiants pour la plupart, of course) se jettent littéralement sur ces « opportunités ». Ça marche très bien. C’est clair qu’à ce tarif-là le turn-over est intense et il ne faut pas espérer une « patte » rédactionnelle particulière (tous les articles se ressemblent, sortent du même moule, c’est de l’écriture au kilomètre). L’article payé 2 euros est vendu 5 euros au donneur d’ordre. Bonjour la marge. Ah c’est sûr ils sont malins.

    Un peu comme chez Fotolia, où il y a des « ordres de mission » (par exemple « photographier un tracteur bleu dans un champ ») pour 5 euros. 5 euros pour une « production photo » ! (je vois dèjà les hordes d’amateurs avec leur Canon « bridge », aller emmerder le fermier de leur bled pour qu’il sorte le tracteur dimanche prochain…)

    La voilà la démocratisation numérique, cher RLZ…

  22. RitonLaZone Says:

    <<La voilà la démocratisation numérique, cher RLZ…

    Ce n'est pas le numérique, juste la baisse des coûts, et ce que l'on appelle numérique n'est qu'un des facteurs, un des plus visible, mais uniquement par aveuglement, il est des facteurs beaucoup plus lourd.
    Les hommes de l'écrit et de l'image ont souvent vendu de l'inaccessible, de la distance, de l'exotisme, du voyage, raconté des histoires, des histoires venues de loin, mais aujourd'hui tout cela est à la portée de presque tout le monde.

    Le photographe et le journaliste font la promotion du voyage pendant des décennies, et un jour cette promotion est tellement efficace, et notre niveau de vie tellement élevé, que tout le monde voyage, et le photographe et le journaliste (en tout cas celui qui en est resté à l'exotisme) perd son boulot et accuse bêtement le numérique.

    Mais non, le premier facteur, c'est la baisse hallucinante du prix des voyages et déplacement.

    A+

    Je complèterais plus tard.

    RLZ

    • Nicolaï Lo Russo Says:

      Ah, il est têtu hein :)
      Dire « ce n’est pas le numérique, juste la baisse des coûts », c’est comme dire, alors que le niveau des océans monte : « c’est pas le réchauffement climatique, juste la fonte des icebergs ».

      Allons allons, RLZ ! Mangez donc une pomme ! :)

      • RitonLaZone Says:

        J’ai dis clairement ce que je pensais de l’origine, et cela n’a rien à voir avec le numérique qui est devenu un épouvantail facile, mais si vous voulez restez crédule, tant pis pour vous.
        (Les photographes sont très crédules sur la cause de leurs petits bobos).
        C’est la baisse du coût de l’énergie qui est la raison principale de cette évolution.
        Le fait qu’il y ait 5600 photographes aux jeux olympiques n’a rien à voir avec le numérique, mais a pour résultat qu’aucun photographe « Olympien » ne gagne sa vie. pourquoi 5600, tout simplement parce qu’un billet d’avion ne coûte rien.

        RLZ

  23. sans colorant Says:

    ne seriez vous pas un peu psychorigide RLZ? ou alors un photographe de « plus de 60ans » qui a deja fait son beurre par le passé et qui adopte une position branchee en louant le numerique? (alors que meme s’il y a de nombreux avantages, le schema ci dessus est tres correct, et preoccupant pour beaucoup! pas que les photographes d’ailleurs…. mais c’est vrai que la mondialisation et la baisse des couts est aussi reponsable..

    • RitonLaZone Says:

      Bonjour,
      Je ne peux pas vous obliger à réfléchir,
      A réfléchir vraiment.

      Pour info, j’utilise le « numérique » professionnellement dans les domaines de la photographie qui me permettent de gagner ma vie, depuis 1990, soit 22 ans ….

      ET c’est l’énergie la clé, le numérique n’est qu’un fétu de paille.

      RLZ

  24. sans colorant Says:

    vous faites l’avocat du diable, soit,mais à trop forcer le trait la crédibilité tombe vite… cela dit si vous adorez le numerique depuis 22ans et que tout va bien pour vous, tant mieux! mais comprenez que tout le monde ne partage pas votre avis.

    • RitonLaZone Says:

      Je voulais seulement dire que je connaissais le numérique depuis ses origines, et que je n’avais nullement besoin d’avoir un coupable facile sous la main.
      Réfléchissez en détail à ce que j’ai écris plus haut, cela peut vous rendre service, il s’agit de raisonnement, d’analyse, pas d’idées reçues.
      Mais vous êtes libre de vous écrouler sans savoir ni comprendre, c’est votre choix.
      Je ne le partage pas.

      RLZ

      Note : vous n’avez pas répondu à ma question, pourquoi 5600 photographes aux jeux olympiques ?

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