Archive for mars 2010

(Vint le printemps)

21 mars 2010


Lumière.
Dehors, les oiseaux.
Allumer la Machine.
Bong de bienvenue.
Bureau.
Répondre au mail de Laurence.
Puis de Bruno.
Puis de Paulo.
Puis de Gian-Paolo.
Puis des Editions de France.
Tu devrais lire ça.
Ce papier rance.
(Dit-elle dans son dos ; se maudissant dans la glace.)
Contacter – essayer – un « opérateur ».
« En tapant #2 »,
Puis #1
Puis #4
Puis #9
Percer l’impasse.
(Ça prit vingt-trois minutes, ce labyrinthe.)
Comprendre les options.
Chez Numericable.
Les nouvelles options.
Non : les nouvelles « nouvelles options ».
Aller sur le site où c’est « clair et complet ».
Si bien expliqué.
Comparer avec Orange.
Vouloir grouper.
Café.
Se dire que c’est pire.
Voir rouge.
Se faire de toute façon.
(Il fut dit : entuber.)
Répondre à une Clothilde.
L’accepter comme « amie ».
En cliquant sur le point vert.
Être « fan de Benjamin Biolay »
De Rosa Nova et de José Bové.
Et de « Palimpestonomicron »
(Il n’était fan de personne ; si : de son rosier nain.)
Répondre à la relance de Marie-Claire.
Commenter le statut de René.
Envoyer un CV.
Dix CV.
Motivés.
Rappeler l’Institut.
Lire le courrier papier.
Trier.
La montagne de papier.
Mettre en route une machine.
De noir.
Lire le livre de Michelle.
Enfin lire… parcourir.
Se dire que Free c’est moins cher.
En étendant le linge.
Encore que, moins cher ?
Répondre à l’appel de Sonia.
Se renseigner sur la fibre optique.
Le futur et toute la clique.
Se désabonner de Ça m’intéresse.
Qui s’empile, sous plastique.
Répondre à la Caisse.
A la demande d’Elodie.
Refuser l’appel de Géo.
Recharger le téléphone.
Songer à remplacer la batterie.
Rechercher le mot de passe.
Parmi les mots de passe.
Relire le post de Pierre.
Bien le comprendre.
Taper le code.
Retaper le code.
Vider le cendrier.
Bloquer ce numéro.
Quels connards.
Ces pubards.
Penser à ce que pense Pierre.
Rappeler Stéphane en urgence.
Transférer ce SMS à Alex.
Qu’il contacte Benédicte.
Qu’elle comprenne.
Faire croire à Thierry qu’on l’aime.
Que tout le monde le trouve« super ».
Voir la réponse de Mario.
Si réponse.
F5
F5
F5
Rafraîchir la page.
Rien.
F5 F5 F5 F5 F5 !
Rien putain.
Downloader le dernier Laurie K.
En attendant.
Prendre l’appel de Stevie.
Sans doute urgent.
Enregistrer l’émission.
Commander des places pour demain.
Son anniversaire.
Y penser.
Merde, trop tard.
Laisser un commentaire sur le blog à Guy.
Non, de Guy.
(On disait « de Guy ».)
En écoutant les Doors sur Jimmy.
Choisir un nouveau pseudo.
Dire à Franck qu’on viendra pas.
Consoler Lucie.
Blacklister Spirou.
Laver les vitres.
(On n’y voyait plus rien, la pièce était sombre.)
Chercher une nounou pour demain.
La trouver absolument.
Envoyer la lettre à ce trou du cul.
En recommandé.
Passer au pressing.
Faire faire un double de la clé.
On sait jamais avec les Espagnols.
En profiter pour remonter les bouteilles de Bolbic.
Checker les mails sur Meat-me.
Répondre aux plus prometteurs.
Envoyer des invits pour samedi.
Télécharger la dernière version d’Aladdin.
Retrouver la partie qui parlait de ça.
Dans l’Ethique.
Envoyer un SMS collectif.
A Elise aussi ?
Surveiller Carla.
Ses allées-venues sur le web.
Quelle salope merde.
Faire un post anonyme.
La piéger.
En parler à Franck.
Mais pas à Jordan.
Surtout pas. (Fût-il décidé.)
Recharger l’iPod.
Voir ce que la dernière version d’iTunes a de nouveau.
Rien.
Comparer les offres de la banque.
Compte Agalys.
Biotalys.
Myoladis Plus
Maladys Super Plus.
Mortadys Plus Ultra.
Donner à manger au chat.
Avant d’aller poser une bombe.
(Il n’osa pas.)
Relire le contrat.
Bien le relire.
Bien comme il faut partout.
‘culés.
Laisser un message à Gabrielle.
Twitter depuis Facebook en passant par Raptor.
Elle, devait savoir.
Suivre s’il le follow.
Se couper les ongles.
Essayer la démo de Penetrator.
Virer les spams.
Flooder chez l’abruti.
Faire la tournée des RSS.
Trier les flux.
Rebondir sur ce que dit Geronimo.
Tâcher de coincer « l’autre con ».
Envoyer un mail à la Rita la Crécelle.
Et toute sa maternelle.
En douce.
Remonter les bretelles à Tarzan.
Écrire le Traité des Honnêtes Gens.
(Qui fut écrit, bien après.)
Lui filer la frousse.
Lui dire que non.
Va chier mon con.
Se dire qu’il faudrait des jacinthes.
Des fleurs partout.
(Il laissa sa terrasse en friche.)
Regarder l’émission d’avant-hier.
Intégrer des notes aux notes.
Éteindre le portable.
Retrouver le carnet.
Trouver un câble USB.
Ou une clé.
Uploader les images.
Dire merci à Gilles pour sa version piratée.
Relire la notice.
Aller sur « crazy-sex.fuk »
Voir si la brune est toujours là.
Avec son oursin dans la chatte.
Se branler.
Se renseigner sur le label « bio ».
Pas se faire avoir.
Mmm les bonnes tomates.
Vérifier le pipi sur la cuvette.
Avant que Michelle débarque.
Changer la caisse du chat.
Mettre son livre en évidence.
Sur une table.
Son livre de merde.
Voir la réponse de Louis à la question de Lupus.
Vite en passant.
Sa fameuse question.
Héhé.
Coincé.
Qu’il a l’air gland.
Louis le Gland.
Quitter le blog.
Ouvrir un peu la fenêtre.
Comprendre pourquoi U-Boat est parti.
Le féliciter pour sa fuite.
Laisser en vitesse un message à Franck.
Pas se fâcher avec lui.
C’est utile un neurologue.
Amadouer les gens utiles.
Guili-guili.
Oublier les inutiles.
Les trop intelligents.
S’en foutre éperdument.
Relire l’Eloge de la cuite.
Enfin un résumé.
Imaginer une suite.
Se dire que les utiles sont inutiles.
Que les inutiles peuvent servir.
Au cas où.
Surtout qu’ils sont souvent moins cons.
En fait.
Jurer de ne jamais rappeler Carla.
Ça, Carla, jamais.
Oh jamais.
Ni Béné d’ailleurs.
Béné la servile.
Nettoyer son répertoire.
En profiter.
Se dire je me remets au sport.
Demain.
(Il ne se remit jamais au sport.)
Hésiter entre le concert, le film, l’expo.
Et ne rien faire.
Laisser venir le printemps.
Reprendre un Tranxène.
Tout tranquillement.
Faire un enfant.
Encore.

Vomir.

(Il fut dit : « le réseau rend fou »)

Gastéropodes

14 mars 2010

(Lecture de la première page d’HYROK, par Giacomo Manfredi, le 12 mars 2010, en la cathédrale de Zvovsk.)

On me demande, on m’envoie des messages : Alors ? Alors Nicolaï ? C’était bien ta soirée hein ! Non ? Tu dis rien ? Allo ? T’es là ? Tu nous fais pas un petit compte rendu, toi ? T’as bien lu en tout cas. Et l’autre aussi il a bien lu, génial. L’acteur-peintre Xavier Devaud. Quels talents. Regarde y a des photos par là-bas.  Allo NLR ? Y a quelqu’un ?

Oui, pardon, bonjour. J’étais un peu ailleurs. Me revoilà.

MERCI à tous d’être venus. Chaud au coeur, vraiment, chouette soirée. J’en ferai d’autres.

Mais, si j’ai bien eu une sensation de chaleur, de convivialité voire même de fraternité, je n’ai pas véritablement d’avis. Je préfère ne pas en avoir, disons, rester dans le flou ; sur cette « soirée HYROK », étrangement, je suis peut-être le seul à ne pas avoir d’avis. J’ai comme un flottement, une mollesse. Une soirée où, semble t-il, — et à en croire quelques échos — « apparence » n’était pas un vain mot : un mot pour le moins hyrokien. Apparence. Un de mes mots préférés. Un terrible mot.

Donc, comme moi je n’ai pas d’avis, comme moi j’étais tellement dans la soirée, dans la lecture, dans ces quelques textes qui tournaient en moi, que je ne l’ai pas vue passer cette soirée, que je ne me suis rendu compte de rien, ou presque, je vais juste retranscrire quelques petits flashes sans prétention, quelques éclats de voix, des trucs qu’on m’a dits. Je suis photographe, bien sûr, mais ce soir-là j’avais pas mon appareil, moi. Et j’ai pas vu grand chose en fait. Alors voilà.

***
Bon, tout est prêt Nico, le buffet, l’éclairage… Il va y avoir assez de vin tu penses ? En rouge on est pas un peu juste ?
Non non, ça va, c’est bon, là… Vingt bouteilles ça devrait aller. Pis y a de la bière et du Coca sinon. J’ai tout prévu. Même dix kilos de clémentines.
Tu voulais une soirée HYROK, tu l’as, mon vieux ! T’as plus qu’à assurer tes lectures.
Pas si facile de se détacher d’un texte qu’on a écrit, encore si frais, mais je ferai au mieux.

***

C’est quoi ces bouquins, là ?…
Quels bouquins ?
Ben ça… Séditions…  Unplugged… La Fêlure…  on dirait la même collection, toutes ces piles de livres…
C’est toute la collection M@nuscrits, oui. Au complet.
Ah bon… Mais ça te gêne pas ?
Comment ça ?
Ben chais pas, c’est la soirée HYROK non ?
Oui mais j’ai aussi proposé à Léo de parler de  M@nuscrits, donc il en a profité pour envoyer toute la sauce, le connaissant c’est normal… Ça ne me choque plus… C’est même bizarre qu’il ait pas mis quelques exemplaires du dernier Nabe avec… — ça j’aurais préféré, remarque… nettement…
T’as pas l’impression d’être un peu dépossédé de ta soirée, là ?
Moi ? Noooon ! Non non. Je suis un mec cool. Très ouvert.
Tu savais qu’il allait envoyer tous ces bouquins ?
Non, du tout. Paquet surprise. C’est arrivé ce matin par coursier.
Putain comment je me serais énervée moi, tu m’fais halluciner avec ton calme… Il prend le CENT pour une librairie ou quoi ? il vient vendre ses bouquins à TA soirée ! C’est hyper cavalier ! T’as pas l’impression de te faire enfiler à sec, là ?
Détends-toi Sylvie, détends-toi. Tout va bien. Relax. Zen. Pas d’enculade, non. Léo est parfois un peu spécial, certes, un peu taquin, mais il est très sympa. Un vrai bon vivant. Le seul des ELS, quand même, qu’est resté quasi jusqu’à la fin et qui m’a dit au revoir, m’a remercié. Tout comme Julia d’ailleurs, une fille formidable, mon éditrice, la toute première arrivée. A l’heure.

***

C’était qui le rouquin au milieu de la table ?
Rouquin ? Blond plutôt. Le directeur littéraire.
Mais il foutait quoi ici ? j’ai pas compris…
Ben.. euh… il présentait mon livre…
Ah bon tu trouves ? Ha ha ha laisse-moi rire…
Je sais pas… T’as pas aimé ?…  Moi tu sais j’avais la tête dans ma lecture…
Il a lu la quatrième de couv’ dans le taxi tu veux dire ! Aucune préparation, rien. Tu parles d’une présentation… Mon pauv’ Nico… t’as vraiment rien vu toi… De l’extérieur c’était à se demander si ces mecs-là sont tes éditeurs… Si même ils ont lu ton bouquin ch’te jure !… Jamais vu ça…
Ah bon tu crois ? T’exagères, quand même…  Ils sont sympas d’être venus déjà… Faut pas leur demander la lune non plus… Les remercier pour leurs efforts plutôt… Ils sont véritablement débordés…
Ouais… C’est à ta fameuse lectrice, Christiane, que t’aurais dû demander de présenter ton livre !
Ben oui, c’est ce qui était prévu mais bon. Comme je l’ai dit, elle a eu une tuile à la dernière minute, c’est pas sa faute, ça arrive. Crois-moi qu’elle aurait mis le livre au centre de la soirée, elle. On en aurait un peu parlé. Je pouvais pas faire ça tout seul.
T’auras vraiment eu de la chance jusqu’au bout toi hein, avec ce bouquin…
Dis pas ça Greg, je suis publié mec, c’est déjà pas si mal… C’est un privilège de nos jours tu sais… un luxe rare… Tu te rends pas compte…
Mouais. Je sais pas que te dire, Nico…

***

Il est venu avec sa petite nièce ?
Qui ?
Ben votre éditeur…
Ah, non, je crois pas… ça doit être une stagiaire sans doute…
Ils arrêtaient pas de parler et de se marrer près de la porte, au début de votre lecture… C’était très pénible… j’ai failli leur dire quelque chose, non franchement…
Ah bon ?
Oui, j’ai trouvé ça très moyen. Ce manque absolu de respect.
Je me suis pas rendu compte vous savez…  J’étais plongé dans mon texte… Mais ça m’étonne de lui quand même, lui si près de ses auteurs, si à l’écoute, si papa poule… Non vraiment je comprends pas. Vous êtes sûr que c’était lui ?
Vous voulez mon avis ? Il en a rien à faire de votre roman, ça se voit.
C’est vrai ça Nico, il a raison : tu m’étonnes de pas t’en apercevoir, toi qu’es si observateur d’habitude, si lucide…
Tu crois ?
Mais c’est clair ! Tiens, t’as qu’à voir comme il se tenait, tout au bout de la table pendant le débat, en arrière, aucune implication, rien. Le mec imperméable, extérieur. Aucun avis sur ton texte, sa saveur, son contenu. Il parlait que de chiffres de vente t’as pas vu ? Bonjour la soirée littéraire !… Il s’est un peu animé quand il a commencé a parler de son truc M@nuscrit là… Et qu’un type posait des questions… Mais ton livre, il l’a pas lu comme il faut, c’est pas possible autrement… Dingue que même toi il ait réussi à t’enfumer…  Même toi !
Dis pas ça, dis pas ça… Il a dû le lire… au moins une partie… Vous savez, c’est pas facile le monde de l’édition, faut les comprendre ces gens-là… Ils peuvent pas être partout, s’occuper de tout le monde comme ils voudraient…
Arrête. T’es un écrivain toi. Un vrai. En un seul bouquin. Boum, l’évidence. Pas besoin d’en « écrire dix », comme il dit si bien… Et ça il doit pas trop avoir l’habitude…
Oh je sais pas… Je sais pas… J’essaie de me faire petit moi tu sais… maintenant j’ai compris…
En tout cas moi vais aller laisser un message sur son blog, dire un peu ce que j’ai ressenti. Non mais merde !
Laisse tomber.
Pourquoi ?
Ton message passera pas, il modère tout ce qui dépasse. Tout ce qu’il ne trouve pas « agréable ».
Ah bon ?
Ben oui. Une façon comme une autre de lutter contre le monde hostile des internautes et des auteurs pas très contents. Si tu veux laisser un message, faut que ce soit un message de remerciements, dire que c’était très sympa, que tout le monde était beau, drôle, sentait bon, etc.
Un blog pare-balles quoi… Dommage.
C’est comme ça. Faut le comprendre, il a beaucoup donné tu sais… Alors là il se recroqueville, il dégage tout ce qui le gêne…  Voilà.
Bon, ben tant pis. Allez, on boit un coup à ton bouquin, plutôt !
A la tienne ! à HYROK !
A la suite de HYROK aussi !
Ah bon, t’en fais un autre ?
Ben qu’est-ce que tu crois Bastien ? Que j’vais m’arrêter là ? A ce premier pavé dans la mare ? Ha ha ha ha ha… T’as rien vu encore…
J’espère que ça parle pas de politique.
Non non. Pourquoi ?
T’es nul en politique.
Tu crois ça ?…

***

(Si vous avez d’autres flashes, d’autres petites bribes intéressantes à transcrire, la parole est à vous, chers invités ! Désolé si vous m’avez trouvé un peu « absent » ce soir-là, à part lors de ma lecture. La soirée continue… maintenant que je suis bien réveillé…)

En tout cas merci encore de votre présence. Frédéric de Beauvoir, le directeur du CENT — que je remercie pour son accueil et son dynamisme —, a estimé quant à lui cette soirée « tout à fait réussie ». Je pense qu’il faut être de son avis.