Archive for août 2007

Le coup du sac

30 août 2007

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Surcouf, fin d’aprème. Ça poisse déjà la rentrée. Des boutonneux livides, cernés, fatigués d’avoir passé leur vacances derrière leur console Wii, s’affairent ça et là, traquant la moindre babiole pour gonfler leur bécane déjà survitaminée. (les plus malins – plus bricoleurs aussi – sont deux rues plus loin, côté Montgallet, la Silicon Valley sino-parisienne.)
Bref, venu juste pour acheter une clé USB 12 Gigas, je fais la queue, prenant mon tour derrière un retraité qui semble hésiter entre « Le web 2.0 pour les nuls » et « Second Life pour le troisième âge : l’espoir? »; (par prudence, il reposera finalement les deux ouvrages). Et là, devant moi sur le mur, pétulants de santé vive et d’envie d’en découdre avec leur solides bretelles en polyvinyle, que vois-je ? les SACS SURCOUF ! affublés de leur prix exorbitants ! Ah les rubiconds ! les clowns ! les rois du Cirque ! Et c’est pas les seuls !
Imaginons : 1000 clients/jour, porteurs d’un sac publicitaire à 15 centimes. Considérant que chaque sac à une surface de 0,25 M2 et que le prix du mètre carré de publicité (mobile en plus !) dans une ville comme Paris avoisine les 20 Euros/jour, cela nous fait… 250×20= 5000 Euros de publicité par jour, payée par qui ? Par vous ! les clients ! Parce qu’en sortant du magasin vous allez quand même marcher un peu dans la rue, non? Monter, descendre des escaliers ! Du métro ! Du Sacré Coeur ! De la Tour Eiffel qui sait ! Et arborer le logo Surcouf (ou Franprix, etc.) dans Tout Paris ! Si on ajoute, cerise sur le gâteau, 150 Euros pour la vente des sacs, l’enseigne se fait plaisir avec ce coup de la pub gratis : 5150 Euros d’économie ! Et pour une dépense en sacs ridicule ! (1000 sacs imprimés doivent leur coûter à peine le prix de ma clé USB…)
Moralité : ne payez (éventuellement) que les sacs BLANCS, ou sans logo distinctif, sans marque. Ceux-là, les siglés, prenez-les, volez-les, par dizaines, faites-en des sets de table, ce que vous voulez, mais jamais, jamais ne déboursez quoi que ce soit. On vous vole éhontément.
Faites allègrement passer l’info…
Ah oui : Au 1er janvier 2010, la commercialisation et la distribution de sacs en plastiques seront interdites. Place à l’amidon de maïs et à la fécule de pomme de terre. Avec ou sans pub.

Devant l’indicible

28 août 2007

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C’est une étrange vitrine, comme à l’abandon, dans une impasse humide du 16e à Paris, où l’on s’étonne de la quantité de rats trop gras qui trottinent le long des lézardes mangées par la mauvaise herbe. Où les mouches bleues tournoient par nuées inquiétantes au-dessus de monceaux rosâtres de viande et d’os. Maintenant nous en sommes certains : les bons hommes verts de la Mairie de Paris n’osent pas s’aventurer partout. Oh que non. D’ici, on entend à peine les rumeurs qui s’élèvent de la rue chic d’où l’on est venu, les dernières traces de vie riante. Les glapissements des rombières en vélo hollandais.
Et puis, l’horreur.
On s’était dit qu’on n’oserait jamais pousser la porte, restée entr’ouverte. Qu’il valait mieux pas. Que ça n’était pas nos affaires après tout. Chacun ses béances, ses cloaques. Mais ces sortes de bruits sourds, cette odeur nauséabonde, ces petits gémissements de l’autre côté de la sale bâche nous ont fait jeter un oeil par le petit trou. Quand même. Nous pencher sur l’abime. Qui nous regardait lui aussi de son oeil de perceuse. Alors on a poussé la porte et on est entré. Pour voir de plus près. Pour crier devant l’indicible.
Je sais que le web est plus ou moins surveillé par une police consternante d’efficacité ; qu’en ces nimbes électroniques, le système ECHELON traque le moindre de nos misérables penchants sexuels. Aussi me contenterai-je, plutôt que de vous raconter bêtement par le menu ce qu’il y avait d’effroyable derrière la bâche, ce qui suintait dans l’ombre, de vous rappeler que les Galeries Lafayette vous attendent, Madame, pour la rentrée scolaire et que Roro a besoin de trois paires de chaussettes. A 10 Euros. Grises.

Rituel utile ou tuile ?

25 août 2007

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Beaubourg, à l’entrée du Centre Pompidou, fin de l’été. Contrôle des sacs. Vigipirates’ vigiles : « s’il vous plaît! ». Que ça nous plaise ou pas on laisse faire. Des fois qu’on aurait emmené un petit pain de plastic pour les quatre heures. Ou une bombe à retardement. Ou une kalachnikov. Faut bien qu’ils vérifient. Avant les hostilités, avant le western. Avant la fin du monde.
Dix-huit poches. Ce sac campeur a dix-huit poches. Trois seront visées par les gardiens de la Paix sur Terre. Qui survoleront les piles de cahiers de leur main blasée. Quinze poches, donc, passeront le contrôle sans problème. Quinze grenades à fragmentation. Faut dire que la bonhommie évidente du possesseur du sac ôte d’emblée toute suspicion. Lui ? faire sauter une bombe? Ha ha ! Impossible : il n’a ni barbe, ni teint basané, ni regard noir belliqueux. (car là on aurait poussé l’investigation jusqu’à la dixième poche.)
Le rituel se poursuit. Des dizaines de sacs contrôlés sommairement. Alors qu’une charge explosive grosse comme un poing de fille peut tuer 20 personnes. Une pomme truquée par exemple. Une bonne Golden des familles, bien jaune. Au TNT. Bref. A quoi servent, depuis le temps, ces « contrôles »? A dissuader? A donner une ambiance sécuritaire (et fallacieuse) qui nous rapproche (encore) des américains? Il n’est pas interdit de se poser la question.

Pour la gloire

14 août 2007

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« Ben » de Nice (comme Brice, vous savez) écrit pour la gloire, donc. C’est clair : s’il fait de la pub pour des stylos, dans les papèteries, c’est pas pour l’argent ! Non non non ! La gloire ! que la gloire ! Parce que l’artiste doit rester pur ! inventif ! ne jamais se répéter ! L’argent? Quelle horreur ! allergique ! Totalement ! Alors faites comme lui, Ben Vautier, écrivez pour la gloire. (Et contactez Clairefontaine si vous êtes célèbre.)

Je suis en vacances là, mais j’écris une petite carte postale de temps en temps. Pour la gloire. Hasta luego.

Les ratés du behaviourisme

10 août 2007

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Hier je tombe en effroi devant ce curieux objet en bois tourné, qui n’est pas sans rappeler le tristement célèbre gynotrope (élaboré dans les années 30 par des psychologues comportementalistes du IIIe Reich qui, dans leurs consternantes batteries de tests, tentaient de « rééduquer » les homosexuels masculins en les enfermant dans une pièce nue avec ce truc au mur – pour constater ensuite, évidemment, un taux d’échec élevé.) Enfin ça m’a quand même donné une idée : Je viens de l’accrocher dans mon bureau ; ma femme fait du 80 bonnet A et comme je suis fidèle (enfin j’essaye hein) et que ma secrétaire, elle, fait du 95 D, je me dis que je pourrai passer mes pulsions sur ce machin de temps en temps. Qui parait-il a été réadapté aujourd’hui pour un usage au champ thérapeutique plus vaste.

Quizz d’été

7 août 2007

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S’agit il :
a – du déménagement de Christo ? (la salle à manger)
b – d’une saisie en douane de copies illégales de Christo ?
c – du mobilier du futur restaurant « le Christo » ?
d – d’un impudent bistrotier qui vient juste de se faire livrer des chaises ?

Pas facile hein ! surtout lorsqu’on sait la peine encourue à quiconque s’aviserait d’emballer un bonbon, une bicyclette (ou même une femme) sans l’autorisation du maestro de l’emballage (qui emballa, souvenez-vous, le Pont Neuf en automne 1985).  » – Je vous l’emballe ?  » me demandait l’autre jour une boulangère à qui j’avais acheté un sandwich. « Surtout pas ! je veux pas d’histoires ! »
C’est qu’en France, paraît-il, les « oeuvres de l’esprit » sont automatiquement protégées par le droit d’auteur. Et ce, grâce à la théorie dite de « l’unité de l’art ». Vous faites le moindre caca sur une toile et hop ça y est, il est protégé. Protégé de quoi? des intempéries si vous le mettez à l’abri, c’est tout. Parce qu’en cas de copie, de contrefaçon ou de plagiat, votre « droit d’auteur » ne vous donne, en fait que le droit d’acheter un paquet de mouchoirs pour essuyer vos larmes. Même si vous parvenez à prouver l’antériorité de votre oeuvre. Ce droit d’auteur est une protection dite « défensive », c’est à dire que si un indélicat s’avisait de vous copier ou de s’inspirer très fortement de ce que vous avez commis (parce qu’il a vu votre travail sur votre site web, par exemple), et qu’il expose, lui, son « travail » dans une galerie en vue, vous l’avez dans le baba : l’indélicat ne peut certes rien faire contre vous (si ce n’est de vous traiter de parasite) mais vous ne pouvez hélas rien faire contre lui (comme faire interdire l’expo, etc.) Nous sommes dans une situation où c’est le Capital qui l’emporte : c’est celui qui a les moyens (financiers, relationnels) de divulguer une « oeuvre de l’esprit » avant quiconque qui aura raison devant la loi.
Avec l’avènement de la mondialisation de l’Art par les réseaux (web, communautés) le fameux et très poussiéreux « droit d’auteur » peut d’ores et déjà se faire de sacrés cheveux blancs, face à la » liquidité des idées » et le règne de l’immatériel. Comme l’industrie de la musique en fait déjà les frais. La prochaine fois je parlerai de l’INPI et de la protection des « dessins et modèles ». Une grosse arnaque la plupart du temps, et surtout une manne pour l’Etat. Qui lui, emballe tout le monde.